Réuni le lundi 31 mai, le Secrétariat permanent a
poursuivi la discussion engagée au Bureau national du
29 et réfléchi à la mise en oeuvre des décisions de ce
Bureau national. Celui-ci, on le sait, a donc décidé
d’engager conjointement la campagne d’adhésions et de
renforcement du POI (voir la résolution et la campagne
des 8000 abonnements durant tout l’été pour
Informations ouvrières). Ces deux objectifs reliés entre
eux supposent la plus grande clarté sur ce qu’est la
position du POI.
1/ Rappelons le cadre. Dans le document d’orientation
sur la réforme des retraites que le gouvernement a rendu
public il y a deux semaines, l’introduction fixe ce cadre :
« Dans son rapport du 14 avril dernier, le Conseil
d’orientation des retraites (COR), organisme
indépendant qui associe notamment les partenaires
sociaux ainsi que des parlementaires de la majorité
comme de l’opposition, a dressé un constat sans appel
des conséquences de ce défi démographique. Si nous ne
faisons rien, nos régimes de retraites seront confrontés à
des niveaux de déficits à peine concevables. »
L’alternative est clairement posée :
- Ou bien le consensus (« Si nous ne faisons rien,
nos régimes nos régimes de retraites seront
confrontés à des niveaux de déficits à peine
concevables» ),. Donc tout le monde doit être lié.
La base du consensus, c’est que la réforme est
nécessaire.
- Ou bien l’indépendance de classe. C’est le mot
d’ordre « ne touchez pas à nos retraites, aucun
consensus, retrait du projet du gouvernement ».
2/ Au lendemain du 27 mai, toute la situation se
concentre sur la réponse à la question suivante : est-ce
que « tout est plié » ou pas ?
Au lendemain du 27, medias et commentateurs ont
martelé le thème de la « résignation », qui, paraît-il,
serait celle des travailleurs. Puis ils ont développé l’idée
selon laquelle rien ne se passerait avant septembre. Puis
le Journal du Dimanche publie cette page entièrement
consacrée à l’opération « référendum ». On y apprend
que Ségolène Royal, mais aussi Pierre Mauroy et
d’autres dirigeants du PS, mais aussi des Verts, ou
encore Jean-Luc Mélenchon, envisagent de lancer une
campagne pour un référendum pour la retraite à 60
ans… Cette opération recèle un piège pour la classe
ouvrière.
Informations ouvrières qui sort sur mercredi 2 juin
revient longuement sur l’historique de ce qui s’est passé
à la Poste. Il y a eu d’abord la grève massive de postiers
contre la privatisation, puis la Commission Ailleret, à
laquelle participaient les organisations syndicales pour
définir les conditions d’ouverture à la concurrence, puis
la grande opération du Comité pour la votation avec les
cartes postales. Et c’est ainsi que les organisations
syndicales, acceptant de se subordonner au cadre
politique du comité pour la « votation », regroupant les
« grands partis de gauche et d’extrême-gauche » - PS,
PCF, PG, NPA …- ont accepté de renoncer à jouer leur
rôle dans l’organisation de la grève pour la défense du
statut, contre la privatisation. Avec les conséquences que
l’on connaît au bout du bout : la loi de privatisation est
passée.
De toute évidence, c’est un scénario de ce type qu’on
voudrait nous ressortir aujourd’hui sur les retraites.
Renonçant à leurs prérogatives, et en particulier la
prérogative de la grève pour bloquer le gouvernement,
les organisations syndicales seraient enchaînées au cadre
« politico-syndical » qui petit à petit, à coup de cartes
postales et de votations, accompagnerait le
démantèlement des régimes de retraite.
Ce qui se combine au fait de centrer la revendication sur
« la défense de la retraite à 60 ans ». Une telle
proposition participe de l’escamotage de la question
centrale, à savoir que le gouvernement veut allonger la
durée des cotisations. Et cela débouche sur un appel à
débattre sur une « bonne » réforme des retraites, au lieu
d’organiser le combat pour l’unité pour le retrait du
projet du gouvernement, notamment à l’occasion de
meetings dans lesquels Mélenchon, Besancenot, Marie-
George Buffet, les dirigeants de la « gauche du PS »,
mais aussi les représentants syndicaux, sont d’ores et
déjà annoncés à Toulouse, Marseille, etc.
3/ C’est dans ce contexte que l’on apprend la décision
par les organisateurs de l’intersyndicale de refaire
l’opération du 27 mai, en pire, le 24 juin. Du plan
gouvernemental, le communiqué commun
CGT/CFDT/FSU/Solidaires/UNSA ne retient que « la
remise en cause de l’âge légal à 60 ans (…)
inacceptable et injuste » et l’intersyndicale regrette que
« les orientations du gouvernement ignorent l’essentiel
des exigences formulées par les organisations
syndicales » . L’AFP interroge : « Grève ou
manifestation ? Les syndicats doivent encore se réunir le
14 juin pour « affiner » les modalités de la nouvelle
journée de mobilisation. » Au gouvernement, les
syndicats qui appellent au 24 juin reprochent qu’il
« écarte toute idée d’un véritable débat ». Bref, journée
d’action sans grève, écartant les mots d’ordre essentiels
concernant l’allongement de la durée de cotisation et la
défense du Code des pensions et des régimes spéciaux.
Le journal patronal Les Échos se félicite :
« L’intersyndicale souffre aussi de ses divisions sur le
fond du dossier : son projet de plate-forme commune de
revendications est au point mort, pour ne pas dire
enterré. »
Il est vrai qu’un dispositif se met en place, qui vise à
barrer la route de l’action indépendante de la classe
ouvrière sur son terrain de classe (la grève) pour bloquer
les plans du gouvernement.
4/ Le POI n’a et ne peut avoir aucune place dans une
opération qui vise à accompagner le « débat » avec le
gouvernement et à annihiler les prérogatives des
organisations syndicales. Et nous comprenons
parfaitement que les appareils qui se prêtent à ces
manoeuvres seraient fort intéressés à nous y associer.
C’est ainsi que par exemple dans une localité, les
camarades d’un comité du POI ont participé à la
discussion avec différents partis se réclamant de la
classe ouvrière pour chercher à définir un appel
commun.
Ils ont permis l’adoption d’un texte, qui, sur nombre de
sujets reprend des mots d’ordre corrects, mais ont été
confrontés au fait qu’au bout du compte, parmi les
signataires figuraient côte à côte à la fois des
organisations politiques et… l’UL CGT.
Immédiatement, l’Humanité cite cet appel pour s’en
féliciter et souligne qu’au-delà des signataires habituels
de l’appel Copernic, l’appel associe ici de « nouveaux
amis », citant expressément le POI. Chacun comprend
ce que cela veut dire. Involontairement, nous nous
sommes trouvés ici entraînés vers une politique qui n’est
pas la nôtre.
5/ La politique du POI se concentre sur les deux plans
que nous avons déjà évoqués : respectueux de
l’indépendance des organisations syndicales les
adhérents du POI n’en sont pas moins attachés à
accomplir et remplir scrupuleusement le mandat qui leur
a été confié par les syndiqués. Comme cela a été signalé
lors du meeting de la Mutualité, les adhérents du POI
membres de FO combattent avec acharnement pour le
succès du 15 juin. Tandis que les adhérents du POI
membres d’autres confédérations sont partie prenante
des discussions qui au sein de ces confédérations
amènent les travailleurs à poser toutes les questions de
l’unité et de la division, de l’action de classe unie et
efficace à l’encontre des politiques de journées sautemouton,
sur des plates-formes limitées aux 60 ans , dans
l’objectif évident de ne pas froisser la sensibilité de la
CFDT qui a donné son accord au gouvernement sur la
question de l’allongement de la durée de cotisation.
6/ Sur le plan politique, la politique du POI se concentre
dans l’appel du 24 avril : aucun consensus avec Sarkozy,
retrait du projet du gouvernement.
L’appel adopté au meeting parisien du 28 mai se
concentre sur l’exigence politique du retrait du projet. Il
se conclut ainsi :
« De ce meeting, nous nous adressons aux partis qui se
réclament de la classe ouvrière et de la démocratie.
Chacun a ses positions. Pour notre part, nous menons
campagne pour :
- Aucune contre-réforme des retraites
- Aucune remise en cause de l’âge légal de départ à la
retraite à 60 ans.
- Aucune augmentation de la durée de cotisation.
- Aucune remise en cause du Code des pensions civiles
et militaires et des régimes spéciaux.
Mais pour bloquer l’offensive qui remet en cause la vie
de dizaines de millions de travailleurs, il faut que tous
les partis qui se réclament du mouvement ouvrier et de
la démocratie adressent d’une même voix, un ultimatum
au gouvernement, pour exiger : Retrait du projet du
gouvernement ! »
Levons une équivoque possible. L’unité des partis pour
le retrait n’est pas la condition du combat victorieux.
Si tel était le cas, cela reviendrait à dire qu’il n’y a rien à
faire, puisque dans le contexte actuel, et au regard des
positions adoptées aussi bien par Martine Aubry dans sa
convention (« elle veut laisser ouvertes toutes les pistes
pour la réforme des retraites ») que par les dirigeants du
PC, du NPA, etc, une telle unité est pour le moins
improbable.
Le sens de cette formulation ne vise pas non plus à
s’adresser aux dirigeants de ces partis pour les prier de
bien vouloir réaliser l’unité (nous ne préparons
nullement l’organisation de délégation en ce sens).
Cet appel vise à permettre la discussion avec les
adhérents de ces partis, leurs sympathisants, leurs
électeurs, de manière à attirer leur attention sur ce qui
est l’obstacle majeur pour la classe ouvrière : le fait que
les dirigeants des partis qui se réclament théoriquement
du mouvement ouvrier, loin de s’opposer à la contreréforme,
loin d’avancer l’exigence du retrait, mettent en
place un dispositif d’accompagnement sous diverses
formes évoquées plus haut.
C’est donc l’engagement de cette discussion que vise cet
appel, permettant là où c’est possible de constituer des
comités « pour l’unité, contre le consensus, et pour le
retrait de la réforme », comités qui, sous une forme
adaptée, seront amenés à formuler ces questions.
Et cela vaut y compris lorsque nous sommes sollicités
pour participer à des discussions avec les représentants
de divers partis, discussions où il nous revient, sous une
forme adaptée, d’interpeller les uns et les autres sur cette
question cruciale : en refusant de se prononcer pour le
retrait du projet du gouvernement, en organisant des
« débats sur la réforme nécessaire », les « partis de
gauche » n’apportent-ils pas au gouvernement Sarkozy-
Fillon l’appui qui lui permet d’aller jusqu’au bout dans
sa contre-réforme ? N’est-ce pas cette recherche d’un
consensus qu’il faut briser ?
Ce sont ces éléments de discussion
politique que les comités et adhérents du POI
peuvent soumettre à la discussion avec les militants
et travailleurs autour de nous, ceux qui combattent
pour bloquer tout consensus sur les retraites, afin de
leur proposer la lecture, l’achat et
l’abonnement à Informations ouvrières dans lequel ils
retrouveront, semaine après semaine, cette
argumentation tournée vers l’aide au combat.
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